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La parole est à M. Patrick Devedjian.
M. Patrick Devedjian. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission spéciale, monsieur le rapporteur général, madame la rapporteure thématique, mes chers collègues, je monte à cette tribune pour dire mon soutien à l’amendement no 1559 déposé par le Gouvernement sur cet article car il est bienvenu, tant moralement que juridiquement. Par son caractère universel, il offre en effet une protection générale qui satisfait des demandes et des exigences relevant de la dignité des personnes. Je ne cacherai pas qu’il soulève aussi la question de l’annulation par le Conseil constitutionnel de la loi votée par le Parlement pénalisant la négation du génocide arménien. Cet amendement présente le grand avantage de dépasser les considérants avancés par le Conseil constitutionnel et permet entre autres la pénalisation du génocide arménien dans un cadre universel.
Cette disposition est d’autant plus bienvenue que j’ai eu la curiosité de rechercher les motivations du Conseil constitutionnel l’ayant amené à annuler cette loi votée par notre Parlement. Jean-Louis Debré, ancien président du Conseil constitutionnel, a bien voulu les détailler dans un ouvrage qu’il vient de publier. On a ainsi la surprise de lire, à la page 100, que le Conseil constitutionnel a pris cette décision parce qu’il ne voulait pas se laisser imposer une lecture de l’Histoire, a fortiori qui ne concerne pas directement la France mais les relations entre des communautés ou peuples étrangers, et qu’il n’est pas normal que la loi française doive se prononcer sur des massacres qui se sont produits au XIXe siècle dans l’empire ottoman.
Il me semble que les considérants du Conseil constitutionnel pêchent par méconnaissance du sujet. Le génocide arménien a eu lieu à partir de 1915, c’est-à-dire pendant la Première guerre mondiale, à l’encontre de la population arménienne réputée alliée de la France alors en guerre contre l’empire ottoman, et non au XIXe siècle. Par ailleurs, il ne concerne pas seulement des communautés étrangères. Je rappelle aux ignares…
M. François Pupponi. Ils sont nombreux !
M. Patrick Devedjian. …que le territoire arménien d’Anatolie était à partir de 1916 un protectorat sous mandat français, dirigé par un Haut-commissaire aux affaires arméniennes français, M. Georges Picot. Par conséquent, il ne s’agissait pas d’un règlement de comptes entre communautés étrangères !
M. Pierre Lellouche. Absolument !
M. Patrick Devedjian. Le Conseil constitutionnel s’en tenant à ces considérants, le Gouvernement nous offre aujourd’hui la possibilité de rétablir les choses. J’ajoute qu’il nous offre aussi le moyen de répondre à l’opinion que le président du Conseil constitutionnel se faisait des parlementaires : selon lui, les parlementaires ayant voté la loi annulée ne s’inscrivaient pas dans cette réflexion mais avaient uniquement en tête l’espoir de glaner des voix pour leur réélection ! Je connais trop les parlementaires qui défendent la cause arménienne, et sais la sincérité de leur engagement. En effet, quelles que soient les souffrances et les communautés – ainsi, la question de l’esclavage trouve tout à fait sa place aux côtés de celle du génocide arménien – tous ceux qui ont connu et partagé les souffrances d’une communauté ou d’un peuple en sont généralement affectés. Leur jugement est aussi fonction de leurs connaissances. Affirmer que le vote des parlementaires procède de raisons électoralistes me semble aussi erroné que méprisant !(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain, du groupe Les Républicains et du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.)